Chapelle Saint-Colomban (16e)
La chapelle est littéralement collée à l'église et, tel à Locronan par exemple, les deux édifices communiquent entre eux.
Saint Colomban (540-615) est un abbé irlandais. Ses litanies contenaient entre autre cette phrase:
"Saint Colomban, ressource des imbéciles, priez pour nous!"
"Saint Colomban avait la réputation de guérir de la folie et des maladies nerveuses, dites parfois "mal de saint Colomban". Aussi accourait-on le supplier de Cornouaille, de Saint-Malo. Les malades et ceux qui les conduisaient faisaient une neuvaine pendant laquelle les patients étaient logés dans un local attenant à la chapelle, de plain-pied avec elle, mais en contrebas du cimetière. Il se divisait en deux compartiments, l'un pour les hommes, l'autre pour les femmes et était confié à la garde du sacristain. Des fers scellés dans le mur permettaient de contenir les forcenés. Un prêtre venait, chaque jour, célébrer la messe, lire l'évangile de saint Jean et les litanies de saint Colomban. Le malade, ou ses parents, faisaient le tour de la chapelle, se rendaient à la fontaine, vénéraient les reliques du saint. Il arrivait à des malades de décéder au cours de cette neuvaine et d'être inhumés, du moins au 17e siècle, dans la chapelle. On n'en compte pas moins de 33 entre 1663 et 1780.
La confiance des Locminois en saint Colomban ne se limitait pas à ces cas. En 1633, un incendie, allumé criminellement dans la maison d'un prêtre, se communiqua aux édifices voisins de la rue de Pontivy et le sinistre ne fut maîtrisé qu'après qu'on eut "porté les reliques de Monsieur saint Colomban et chanté l'hymne et l'oraison" de son office.
Les cérémonies en son honneur se célébraient avec grande solennité, le 26 novembre, jour de sa fête, mais aussi les 27, 28, 29 juillet pour l'anniversaire de la translation de ses reliques. "La procession se déroulait en grande pompe, précédée des cavaliers de la maréchaussée ; les magistrats y assistaient en robe de palais, les corporations avec leurs bannières et leurs insignes. Tout se terminait par un feu de joie".
Après la Révolution, les processions reprirent dès le 24 novembre 1801 et un serrurier répara les chaînes et les menotes de la "chapelle du mal", mais les esprits avaient changé. En 1818, le colonel des hussards en garnison à Pontivy y visita Locminé et se montra horrifié du traitement que l'on faisait subir à une patiente nommée Françoise Gougaud. Il en informa le procureur général de Rennes qui n'y vit qu' "actes de barbarie et d'inhumanité commis sous le voile de la religion" et menaça de prison et de travaux forcés les auteurs d'arrestations illégales et de séquestrations de personnes et ceux qui se feraient leurs complices. Se trouvaient directement visés les parents des malafes et le clergé de Locminé.
Blessé dans son honneur et dans sa foi, le curé Raoul réagit vigoureusement contre de telles accusations et de telles menaces. Il en écrivit à plusieurs reprises à l'évêque qui s'efforça de faire comprendre aux autorités judiciaires et civiles que c'était là une antique tradition, bien connue de tous et même des magistrats, et le seul moyen de tenter de venir en aide aux malades et à leurs familles durement éprouvés. Rien n'y fit. Le procureur de Rennes réitéra ses ordres et obtint l'appui du ministre de l'Intérieur : "L'état de folie et d'imbécilité a ses dangers pour l'intéressé et pour la société. Aussi donne-t-il lieu à l'interdiction selon les formes établies, mais il n'autorise point les parents à les sequestrer eux-mêmes et à les traiter comme ils l'entendent". Le "cachot" fut fermé et le substitut du procureur se saisit de la clé. Ce fut un coup dur pour le pèlerinage de Locminé.
La dévotion des Locminois à saint Colomban persista cependant. La fête des reliques, célébrée maintenant le dernier dimanche de juin, gardait toute sa solennité. Ainsi, en 1911, la cité avait revêtu sont habit de fête. Le long u parcours de la procession, on pouvait admirer les avenues d'arbustes, des dômes de verdure, des enfilades de guirlandes. Les maisons étaient parées de tentures et les drapeaux claquaient joyeusement au vent. Le soir, la place Saint-Sauveur s'illuminait pour la retraite aux flambeaux. "Il faut reconnaître, notait le curé, les Locminois aiment à honorer leur saint patron, alors que les vrais pèlerins se font rares."
Longue d'une vingtaine de mètres, la chapelle, avant els travaux de 1843, débordait largement la nef de l'église vers l'ouest. A la veille de sa démolition, la chapelle de disposait plus que de l'unique autel dédié à saint Colomban. "
Extrait de "Eglises et Chapelles du Pays de Locminé" du chanoine Joseph Danigo (UMIVEM, 1991)