Chapelle Saint-Gildas

Saint-GildasLa chapelle a été édifiée sur le lieu même où l'ermite fondateur de l'abbaye de Rhuys finit ses jours en 570.

De cette époque ne subsistent qu'une arcade intérieure et la baie orientale, l'édifice ayant été reconstruit en 1837. Le premier bâtiment correspond sans doute à la sacristie. Le sanctuaire est encastré à même la roche, qui joue le rôle d'un mur de soutènement et d'un versant de toiture visible à l'intérieur. A côté de la chapelle, dont un angle dévoile une tête sculptée, une anfractuosité abritait, selon la tradition, saint Bieuzy et l'ermite saint Gildas qui mourut en 570.

L'ensemble subit une restauration complète vers 1980.

Une vieille planche de bois, conservée dans la chapelle, porte l'inscription bretonne dont voici la traduction:
"Chapelle bâtie à l'intention de saint Gildas en l'an 600. Cette chapelle bâtie sous le rocher a été construite pour dire la messe: en janvier pour la fête de saint Gildas; le lundi de Pentcôte; les lundis de Pâques et de La Trinité; le dimanche précédent ces fêtes, on vient demander la purification des morts. Ce jour-là, le Père Saint est toujours prêt à accorder, en cas de nécessité et pour sauver le peuple, sa prière pour rappeler qu'il sait être le maître. Quand cette intention est en eux, il sait donner l'Indulgence à ceux qui préparent le Mal, et soulager les pauvres. Le 28 janvier 1810, cette chapelle a été restaurée."

En 1843, la pierre sonnante sert toujours de cloche, et les cinq offices divins sont toujours assurés. En 1847, la chapelle est desservice "certains jours de l'année".

Autrefois, le lundi de Pentecôte, les femmes venaient à la fontaine, versaient de l'eau dans leurs manches puis levaient els bras. Ainsi combattaient-elles la stérilité et autres "maladies féminines". Pendant ce temps, les mendiants prenaient la pierre sonnante de saint Gildas et la faisaient retentir en la frappant sur une meule gallo-romaine installée devant la chapelle. On dit que cette meule aurait été utilisée par Gildas, lors de son séjour à Bieuzy, pour appeler ses fidèles.

Au 19e, Guillaume de Corson en donne une description très colorée :

"Nous visitons l'oratoire de Saint-Gildas le jour même de son pardon, c'est-à-dire le lundi de la Pentecôte ; nous n'oublierons jamais l'aspect tout à la fois pittoresque et édifiant de cette fête.
Descendus de bonne heure dans la vallée, nous trouvions déjà bien des pèlerins agenouillés les uns dans le petit sanctuaire, les autres près de la fontaine du saint. Ah ! elle est bien simple cette fontaine coulant tout près de la chapelle, sans édicule et ornementation quelconque ! Toutefois, des femmes paraissaient fort eonvaincues de l'efficacité de ses eaux, après en avoir bu à plusieurs reprises, elles s'en versaient dans les larges manches de leurs vêtements et, levant les bras en priant, elles faisaient pénétrer cette eau bien avant, de façon à leur arroser le corps.
Devant la porte de la chapelle, des mendiants, coureurs de pardons, faisaient retentir la pierre sonnante de saint Gildas : il paraît qu'à l'origine, cette pierre servait de meule au bienheureux solitaire pour écraser son grain ; actuellement, on la conserve d'ordinaire dans l'oratoire, mais le jour du pardon, on la replace sur une autre pierre posée à demeure devant le sanctuaire, et sur laquelle elle pivote ; en la choquant alors avec une troisième pierre, elle rend en effet un son analogue à celui d'une cloche.
Sous de grands arbres formant un petit bois à l'ouest de la chapelle, se dressaient des tables et s'amoncelaient vivres et boissons ; puis, au sommet de rochers abrupts dominant le sanctuaire, s'élevait un grand bûcher garni de diverses pièces devant le transformer en feu d'artifice.
Pendant que nous examinons avec intérêt ces préparatifs de fête, tout à coup nous entendons des roulements de tambour accompagnés du son aigu des fifres : c'est la paroisse de Bieuzy qui arrive processionnellement à Saint-Gildas. Nous nous rangeons à quelque distance sur une pointe de rochers et nous assistons à un charmant défilé : ce sont tout d'abord les deux sonneurs d'échelettes, sorte de clochettes qu'ils agitent en cadence, puis la croix et la bannière de l'église ; vient ensuite le drapeau paroissial flottant au vent, suivi d'un second étendard ; les tambours et les fifres paraissent alors ; tous les hommes portant quelque insigne marchent isolés les uns des autres, gravement à la file, revêtus de leur joli costume : l'habit de laine blanche, garni de velours noir tailladé, et rehaussé de légères broderies en soie rose ; c'est au reste le costume de Bieuzy. Les porteurs de reliques, revêtus d'aubes blanches, s'avancent ensuite : tout d'abord ceux qui soutiennent le brancard du buste de saint Bieuzy, puis ceux qui portent le reliquaire de saint Gildas, le clergé de la paroisse vient après ; enfin une foule bariolée de toutes couleurs suit dévotement, le chapelet à la main, et ferme la marche ; il y a là des hommes de Bieuzy avec leurs vestes blanches aux velours brodés et tailladés et des hommes de Baud à la même veste blanche aux larges bordures de velours noirs coupées droit ; d'autres portent la veste noire mais toujours enrichie de velours ; tous ont des pantalons de couleurs et des chapeaux ornés de longs rubans de velours. Quant aux femmes, les unes ont de grandes coiffes en forme de capote retombant sur leurs épaules, les autres un bonnet de velours noir dont les pantes sont doublées de drap rouge ; toutes ont un corsage divisé fort agréablement par un large velours, et leurs manches très amples sont ornementées de la même façon ; toutes enfin ont des tabliers de couleurs éclatantes, rouge, bleu, vert, toutes les nuances de l'arc-en-ciel.
Ce mélange de costumes aussi diversement coloriés, produit dans la verdure des champs un aspect très curieux. Pour nous, nous ne nous lassons point de voir cette foule, revêtue de costumes vraiment bretons, descendant les rochers de Castennec, disparaissant un instant dans les creux de la montagne pour reparaître un peu plus loin, mêlée aux landiers fleuris, 'la fleur d'or de Bretagne', traversant le petit bois qui avoisine la chapelle en jetant seulement un coup d'oeil sur les tables déjà dressées, puis entourant l'oratoire incapable de renfermer tant de monde.
Pauvre petit oratoire ! Dans sa rustique simplicité, il a cependant pris un air de fête ; des guirlandes garnissent ses murailles et quelques oriflammes tapissent son rocher. Quand la procession y entre, une salve de pétards rend honneur aux reliques des saints qui habitèrent jadis ce lieu ; et la musique champêtre répond à cette salutation par ses airs les mieux choisis.
La grand-messe commence alors : selon la coutume les tambours et les fifres s'y font entendre à plusieurs reprises. Puis, l'office terminé, chacun va prendre son repas, les uns dans les villages voisins chez des parents ou des amis, les autres dans les coins des rochers, sous des arbres feuillés, sur la pelouse bordant la chapelle, au bord de la fontaine ou sur la rive même du Blavet.
Le dîner terminé, la fameuse cloche de pierre se fait entendre, les tambours battent le rappel, on se groupe de nouveau autour du sanctuaire et le chant des vêpres commence. Après celle-ci, la procession se reforme telle qu'elle était le matin, elle quitte le vallon béni par saint Gildas, elle remonte à Castennec et trouve sur son chemin, au sommet des rochers de l'ermitage le bûcher qu'elle allume en signe d'allégresse et les pièces d'artifice qu'elle fait bruyamment éclater ; puis au chant des cantiques bretons de saint Gildas et de saint Bieuzy, auquel vient se joindre le chant liturgique du Te Deum, elle poursuit sa marche dans la campagne et regagne le bourg de Bieuzy à travers monts et vallons".
(Extrait de "Eglises et chapelles du Pays de Baud", du chanoine Jean Danigo, UMIVEM 1974)

La pierre sonnante existe toujours. Elle a été placée sur un socle à l'intérieur de la chapelle.