Chapelle de Kermaria-an-Iskuit

Selon la tradition, cette chapelle aurait été voulue par un seigneur local, Henry d'Avaugour, qui, revenu sain et sauf d´une croisade en 1240, tint à manifester sa reconnaissance envers "Marie qui sauvegarde" (en breton Iskuit).

Elle a été souvent modifiée et remaniée entre les 13e et 18e siècles.

Son intérieur se distingue par des fresques, notamment la Danse macabre. Elle présente 47 compartiments représentant alternativement un vivant et un mort. On voit le pape, l'empereur, le cardinal, le roi, le patriarche, le connétable, l'archevêque, le chevalier et l'évêque. Entre le connétable et l'archevêque, le mort, seul personnage parmi tous, est habillé. Ont disparu l'écuyer, l'abbé, le bailli, l'astrologue et le bourgeois. Quatre prophètes sont également illustrés: David, Osée, Isaïe et Jérémie.
De l'autre côté, on distingue le chartreux, le sergent, le moine en tunique courte et jouant du biniou, l'homme de loi, le pauvre. A la place où devrait apparaître un mort, on voit un vivant, l'amoureux. Puis suivent une femme et un autre amoureux, puis un ménétrier. Enfin, le laboureur et le cordelier ferment la marche. La frise se terminait par la représentation aujourd'hui effacée d'un enfant mort-né.

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Le symbolisme de l'oeuvre est évident: tous mourront, qu'ils soients riches ou pauvres, religieux ou laïcs, nobles ou gens du peuple. L'Amour est éternel. Chaque personnage est accompagné d'un poème à huit vers qui constitue un dialogue avec le mort. Les seuls encore lisibles sont les suivants:

LE CARDINAL
J'ay bien cause de mesbahyr
Quand je me vois de si près pris
La mort m'est venue envayr

Plus ne vestiray vert ni gris
Chapeau rouge ne chappe de pris
Me fault laisser à grande détresse
Je ne l'avoye pas appris
Toute joyce finie en tristesse.
LE MORT
Venes noble roi couronné
Renommé de force et prouesse
Jadis frustes environnés
De pompes grandes de grand-noblesse
Mais maintenant toute haultesse
Laisserez vous n'êtes pas seul
Poy aurés de votre richesse
Le plus riche n'a qu'un linceul.
LE ROI
Je n'ay point appris à dancer
A dance et nôte si sauvage
Hélas on peut voyer et panser
Que vault orgueil, force lignage
Mort destruit tout c'est son usage
Auscitôt le grand que le moindre
Si mains se prise plus et sage
A la fin faut devenir cendre.
LE MORT
Patriarche pour basse chère
Vous ne pouvez être quitte
Votre double croix qu'avez chère
Digne autre aura cette équité
Ne pensés plus dignitté
Ja ne serez pape de Rome
Pour rendre comte être cité
Folle espérance déchoit l'homme.
LE PATRIARCHE
Bien parchoy que mondains honneurs
Moult déchoit pour le voir
Mes joys tournent en douleurs
Et que vault tant de honneurs avoir
Trop haut monter n'est pas savoir
Hault eslas gattent gens sans nombre
Mes pour le veulent parcevoir
A hault monter je fais encombre.
LE MORT
C'est de mon droit que vous mainne
A la dance gens connétable
Les plus forts comme Charlemainne
Mort prant c'est chose véritable
Rien n'y vault chère espuantable
Ne force armure en Cette Assaut
D'un coup jabas le plus estable
Rien n'est darmer quant mort assaut.

Il existe encore d'autres peintures du 15e reprenant des thèmes typiques pour cette époque: le combat des Vertus et des Vices, le dit des Trois-Morts et des Trois-Vifs.

La chapelle abrite également de nombreuses statues, dont certaines illustrent des sujets qu'on retrouve souvent en Bretagne: saint Michel terrassant le dragon, sainte Anne.

Une trappe au milieu de la nef mène à un caveau d'où partait autrefois un souterrain jusqu'au château de la Noë entre Lanloup et Pléhédel.
L'escalier à gauche de la porte latérale menait à la salle de justice au-dessus du porche, oú les seigneurs rendaient la justice. Le héraut lisait la sentence du haut du balcon.
Un autre escalier permettait de monter au jubé. Sous les marches se trouvent deux auges de pierre. Les prévenus s'y lavaient les mains et les pieds avant de comparaître devant le seigneur.

En 1963, des fouilles ont mis á jour une boîte métallique contenant un coeur humain momifié avec une mèche de cheveux. Ce sont les restes de Guillaume-Jacques de Galhouët, du 3 novembre 1729.

On trouva aussi un coeur taillé dans la pierre du pilier de l'angle gauche du choeur et portant la trace d'une scellure en plomb. On pense qu'il s'agit du coeur de l'épouse de Guillaume.

Photos Office de Tourisme de Plouha et Médiathèque de l'architecture et du patrimoine